Plus de 110 migrants sont portés disparus après le naufrage jeudi de leur bateau au large de la Libye, un nouveau drame qualifié par l’ONU de la «pire» tragédie en mer Méditerranée cette année.

Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), une centaine d’autres migrants à bord du bateau qui a coulé au large de la ville libyenne de Khoms (ouest), ont été secourus. Ils doivent être placés, d’après la marine libyenne, dans des centres de détention dont les conditions sont souvent dénoncées par les ONG. L’OIM et la marine libyenne ont fourni des chiffres différents sur le nombre de migrants disparus et secourus par les gardes-côtes d’un pays plongé depuis 2011 dans le chaos avec des luttes de pouvoir et des milices qui font la loi. Safa Msehli, chargée de la communication au bureau de l’OIM en Libye, a déclaré à l’AFP que 145 migrants avaient été secourus et ramenés vers Khoms, à 120 km à l’est de la capitale libyenne Tripoli. Certains survivants ont raconté que leur bateau avait coulé et qu’il y avait encore à bord quelque 150 migrants, a-t-elle ajouté.

Le général Ayoub Kacem, porte-parole de la marine libyenne, a lui affirmé que «134 migrants ont été secourus et un corps repêché, alors que 115 migrants sont portés disparus». «Une embarcation en bois transportant environ 250 migrants clandestins, dont des femmes et des enfants, (…) a fait naufrage à moins de 5 milles marins de la côte selon les témoignages de rescapés», a-t-il précisé dans un communiqué.

Les migrants secourus, des Erythréens pour la plupart, mais également des Palestiniens et des Soudanais, «se trouvent toujours au poste des gardes-côtes» de Khoms et «n’ont pu être remis à des centres d’hébergement», selon Ayoub Kacem. «Nous attendons du ministère de l’Intérieur et, précisément de l’Organe de lutte contre l’immigration clandestine, qu’ils les prennent en charge».

«La pire tragédie en Méditerranée»

«La pire tragédie en Méditerranée cette année vient de se produire», a déploré le Haut-Commissaire de l’ONU pour les réfugiés (HCR), Filippo Grandi, sur Twitter. «La reprise des opérations de sauvetage en mer, la fin de la détention des réfugiés et des migrants en Libye, la multiplication des voies de sortie sûres hors de la Libye sont nécessaires maintenant (…)», a-t-il dit. Généralement, les migrants secourus en mer et ramenés en Libye sont d’abord accueillis par le Croissant rouge libyen, les personnels de l’OIM et d’organisations locales qui leur offrent soins et nourriture. Ensuite, ils sont placés dans des centres de détention.

«Les réfugiés et les migrants en Libye sont extrêmement vulnérables et ont droit à une protection au titre du droit international humanitaire», a indiqué Thomas Garofalo, directeur du bureau libyen de l’International Rescue Committee (IRC). Pour lui, il est «urgent» que les missions de recherche et de sauvetage des ONG soient «dépénalisées» et que l’opération Sophia soit rétablie. «Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons éviter des tragédies comme celle que nous avons connue aujourd’hui». Ces dernières années, les navires des ONG et ceux de l’opération européenne Sophia sont intervenus pour secourir les migrants. Mais ces opérations ont pâti en 2019 de la réduction du champ d’action de Sophia et des démarches contre les ONG d’Etats européens cherchant à limiter l’arrivée des migrants. Avant le naufrage de jeudi, le HCR et l’OIM avaient fait état d’au moins 426 personnes mortes en tentant de traverser la Méditerranée depuis le début de l’année.

Le Figaro