Il est trop actif sur les réseaux sociaux et il suscite des débats autour des sujets brûlants de l’actualité sociopolitique et économique de notre pays. M. Aimé Stéphane Mansaré puisqu’il s’agit de lui, est sociologue de formation et expert-consultant en développement. Dans cette première partie de cette interview qu’il a bien voulu nous accorder, nous parlons entre autres de l’actualité sociopolitique et la question de l’opportunité ou non de doter notre pas d’une nouvelle constitution. Lisez plutôt…
Kibaro224.com: Bonjour monsieur Mansaré. Dites-nous tout d’abord quel regard portez-vous sur l’actualité sociopolitique et économique de notre pays.
M. Mansaré: Bonjour à vous, l’actualité sociopolitique et économique de notre pays est toujours caractérisée par les effets d’une persistante inadéquation entre les besoins et la demande sociale d’un peuple qui s’appauvrit au regard d’une immensité inouïe de son potentiel et, par rapport aux réponses apparemment insatisfaisante données par ceux qui le dirigent.
Ce qui aggrave les effets systémiques de cette inadéquation entre demandes sociales du peuple et réponse des gouvernants, c’est surtout certaines déviances instituées de façon diffuse comme des vertus de notre société notamment:
1- La politisation et la communautarisation excessive de toutes nos réflexions individuelles et collectives qui empêchent, les guinéens quelques soient leurs niveaux intellectuels de juger les faits portant sur le développement en dehors d’une idéologie partisane.
2- L’incapacité des gouvernants successifs à gérer convenablement les compétences techniques sur lesquelles portent tout processus de développement d’un pays en les différenciant carrément de celles des enthousiastes et des opportunistes qui représentent plus de 70% des cadres guinéens qui se battent soit pour conserver leurs privilèges ou les conquérir.
3- Le recyclage politique incongru des voleurs d’hier qui deviennent du coup des leaders charismatiques adulés par un peuple martyrisé qui est le plus souvent dopé et mobilisé pour défendre ses anciens bourreaux vers des changements inachevés aux tendances de retour vers les situations initiales.
4- La corruption et le vole à ciel ouvert des grands commis de l’Etat avec un effet négatif irréversible sur le subconscient collectif du guinéen moyen qui estime en fin que gérer et ne pas voler est plutôt un crime ou une malédiction au lieu d’être une vertu.
5- L’absence quasi-totale de la gestion axée sur les résultats dans l’administration publique qui renforce les reflexes subjectifs qui paralysent et asphyxie les résultats en terme de développement. Etc…
Alors, au regard de ces déviances parmi tant d’autres, mon constat d’agent de développement n’est nullement satisfaisant car quand dans un pays potentiellement riche soit-il, les faits sociopolitiques et économique ne peuvent plus faire l’objet d’une analyse objective, c’est pour moi plus que la catastrophe qui indique des crises cycliques qui risquent comme un serpent qui se mort la queue.
Dommage pour ce pays de pauvres aux inestimables potentialités comme une bande d’enfants qui se querellent mortellement à cause d’un bonbon sur une montagne d’or et de diamant. Il faut indubitablement un changement profond de paradigme mon cher!!!!
Kibaro224.com: Aujourd’hui, l’actualité politique dans notre pays reste focaliser sur la question de troisième mandat. Des mouvements d’opposition se créés un peu partout dans le pays. Comment vous analysez tout cela?
M. Mansaré: Tu le sais certainement mon cher pour peut être avoir lu plusieurs de mes articles sur cette question généralement très mal posée par des débatteurs sociopolitiques piégés chacun par des reflexes de passion idéologique hermétique et parfois subjective.
Pour moi, la question du troisième mandat est définitivement et clairement tranchée dans la constitution de Mai 2010 à travers des dispositions intangibles aussi bien dans l’esprit et la lettre des articles concernées.
Par contre, la question la plus floue aux yeux même des plus grands juristes guinéens reste encore aujourd’hui l’interprétation consensuelle de l’article 52 de la même constitution sur la possibilité ou non qu’aurait le président de la république de proposer au referendum TOUT PROJET DE LOI y compris ou non UNE NOUVELLE CONSTITUTION. C’est un débat ouvert qu’il faille clôturer légalement et rapidement par qui de droit.
A ce niveau et en bon intellectuel pour le moment neutre, je souhaite que la question soit tranchée par des juristes attitrés ou du moins en recours par une institution juridique ayant compétence de tranchée selon les dispositions de la même constitution.
Concernant la possible prorogation de l’actuel mandat présidentiel, ma conception personnelle qui peut être discutable est que techniquement je ne vois pas un chronogramme consensuel de la CENI qui puisse tenir la route pour une élection présidentielle à la date prévue même quand une hypothèse de couplage avec les législatives est envisageable.
En partant de l’hypothèse que les députés aussi bien de l’opposition que de la mouvance ont tous accepté et savouré la prolongation de leur mandat, tu peux bien tirer les conclusions si la même contrainte se posait pour les prochaines présidentielles!
« La société civile doit éviter les coalitions avec les acteurs politiques »
Kibaro224.com: Pensez-vous que le président actuel a le droit de demander une nouvelle constitution ?
M. Mansaré : Quand les plus grands juristes guinéens s’affrontent sur cette question en interprétant différemment les articles de la même constitution, principalement l’article 52 et d’autres d’ailleurs, comment pourrais-je en tant que sociologue répondre à une telle question?
Cependant je constate qu’aussi bien les populations , les acteurs sociaux et les leaders politiques restent encore divisés, les uns traitant les autres d’imposteurs et vice versa!
Devant une telle situation d’impasse politico-juridique pour tout intellectuel averti et assumant pleinement sa neutralité, le compromis est inévitable si l’on ne veut pas privilégier l’alternative de confrontations généralisées dans un contexte national fragilisé par les reflexes identitaires avec une malheureuse tendance vers une dictature des majorités ethniques.
En étant pas pour le moment dans les secrets de la nouvelle constitution et au regard du contexte sociopolitique actuel très tendu de part et d’autre, j’opte pour des débats inclusifs rationnels et non passionnels pour réussir des compromis qui ne soient pas obligatoirement à l’avantage des acteurs politiques omnibulés simplement par les volontés d’accéder ou de conserver le pouvoir.
Et d’ailleurs je pousse souvent l’intelligentsia guinéen à prospecter au-delà du combat pour une simple alternance politique qui n’est pas obligatoirement le gage sacré capable de sortir ce pays de ce cycle infernal (depuis plus de deux décennies ) de CHANGEMENTS INACHEVÉS qui ne profitent pas encore suffisamment au peuple.
L’analyse sociologique de l’espace politique guinéen identifie des tendances de prostitution démocratique avec des acteurs politiques anciens hauts cadres quasiment communautaires qui ne rassurent que les néophytes et ceux qui se battent malheureusement avec le prisme les reflexes identitaires et clientélistes.
C’est pourquoi j’ai conseillé la société civile à éviter les coalitions avec les acteurs politiques de tout bord pour mieux voir dans les entrailles des velléités d’engagements politiques, les intérêts durables et irréversibles du peuple de guinée.
Je n’ai pas du tout peur d’être incompris par un des camps politiques qui m’accable ou m’adule en fonction des articles dans les quels ils trouvent ou non les fondements idéologiques de son combat.
En réalité ma position est invariable et neutre sur le plan politique depuis plus de 2 décennies. Elle porte tjrs (et elle le sera davantage sur ce qui est pertinent non pour un changement inachevé à la solde des hommes politiques) sur les alternatives qui peuvent accélérer et renforcer le processus de développement du pays en faveur du peuple.
Kibaro224.com: Vos publications sur les réseaux sociaux font dire à certains que vous êtes un des promoteurs du mandat à vie. Que répondez-vous ?
M. Mansaré : Ceux qui le pensent sont soit de mauvaise foi ou sont des eternels adolescents dont le niveau d’analyse de l’espace politique guinéen est statique et éternellement motivé par des reflexes identitaires et clientélistes.
Je ne suis pas pour des analyses de chainons politiques qui n’intègrent pas la chaine politique entière et, c’est ce qui continue à faire mal à ce pays car mêmes certains intellectuels sont partisans des débats de caniveaux.
Je te fais une petite historique d’une séquence de mon combat d’idées systémiques à la veille de la mort du président Lansana CONTE.
Tous les guinéens savaient que la situation générale du pays étaient chaotique car tous les secteurs vitaux étaient déliquescents pour compromettre le développement dans un contexte même démocratique. Comme aujourd’hui j’avais combattu les coalitions incongrues entre les acteurs politiques et ceux sociaux pour qu’en s’inspirant de l’exemple Ghanaen de RAWLINGS, la transition militaire de l’époque soit mieux gérer et qu’à travers une charte, elle puisse accoucher d’une nouvelle société guinéenne prête pour la démocratie.
Malheureusement et très malheureusement les précipitations politiques qui l’eternel outil des hommes politiques ont englouti la société civile et les vraies maux de la société guinéenne et les préoccupations du peuple ont été mis au second plan.
Encore aujourd’hui, les guinéens oublis que la marche du peuple ressemble étrangement à l’océan qui ne garde jamais les ordures sans âpres quelque soit le temps finit par les rejeter aux larges là où la forfaiture a été commise!
Les turbulences sociopolitiques incongrues que nous vivons maintenant tirent en partie leur origine de notre manque de vigilance et d’analyse approfondie.
Encore aujourd’hui, tout le monde est focalisé sur l’alternance ou non comme s’il n’y avait que ca dan un contexte politique déphasé où n’importe quel porteur sortirait la Guinée de l’ornière.
En plus de l’alternance politique que je souhaite de vive voix, je continue à m’interroger sur le porteur potentiel de cette alternance qui pourrait exacerber les confrontations ethniques.
J’ai l’impression que se sont ces interrogations profondes que je suscite dans mes publications sur les réseaux sociaux qui font croire à une cohorte de néophyte que je suis promotteur d’un mandat à vie. Je m’en moque vraiment
Kibaro224.com: Notre pays a-t-il besoin aujourd’hui d’une nouvelle constitution ? Si oui, quels doivent être les changements à apporter selon vous?
M. Mansaré : Pour moi sociologue dont le fondement professionnel consiste à faire des analyses INDICATIVES et NORMATIVES, je conclu selon ces deux alternatives d’analyse:
– Au titre de l’observation indicative, il est indéniable que la CONSTITUTION actuelle regorge des insuffisances reconnues par une partie des guinéens notamment: Les candidatures indépendantes; le caractère communautaire des partis politiques et leur fonctionnement démocratique à l’interne avec possible alternance aussi; l’encouragement des alliances maritales mixtes; le ticket président et vice président depuis la candidature pour la succession en cas de vacance du pouvoir etc…..
J’estime également qu’au-delà d’un déterminisme juridique (qui l’autoriserait ou non ) que je ne saurai me faire prévaloir en tant que sociologue, c’est bien le moment et le contexte de l’intention qui pose problème chez certains guinéens qui débâtent avec moi. A ce niveau et quand les juristes et les institutions habilitées vont trancher en faveur ou contre, les détails sur l’opportunité de le faire aujourd’hui me permettront de me prononcer.
– Au titre de l’observation normative, alors , je préfère ne pas trancher mécaniquement entre ceux qui disent OUI et ceux qui pensent NON en raison de la détermination des uns et des autres à aller jusqu’au bout.
Je pense qu’il faut œuvrer pour un débat inclusif avec une neutralité affichée de la société civile en vue de s’entendre sur le quand, le contenu et le comment proposer une CONSTITUTION adéquate qui réponde aux besoins et la demande sociale du peuple.
Par expérience et connaissant bien le terrain sociopolitique guinéen, les tendances affichées pour les affrontements seront improductives et le peuple en souffrira davantage.
La suite de cet entretien est à retrouver prochainement sur Kibaro224.com
Interview réalisée par Konaté
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